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Le projet Travelling Natures est un projet artistique voyageur et contextuel. Il s’articule autour d’une série d’actions, de productions et de diffusions qui prend en compte les contextes des différents territoires où nous résiderons sur l’île de Java en Indonésie et en France, à Labège, à Saint-Denis et dans la région paloise. Cela a abouti à la réalisation d’un environnement multimédia et d’un dispositif interactif associant le son et la vidéo ainsi que des formes plastiques et graphiques.

Il s’agit dans un premier temps de résidence, de sonder la psyché et la mémoire d’une communauté. Pour cela nous entreprenons un travail d’échanges avec les habitants des différents territoires sous la forme d’observations et de rencontres : Nous constituons une collecte d’objets enregistrés et filmés. Différentes informations sont glanées auprès des habitants, de l’ordre du souvenir, du sentiment d’appartenance à une communauté, de la projection de soi dans l’avenir. Nous étudions également les formes de rituels collectifs inhérents à chacune des communautés. Dans un second temps nous travaillons à partir de ces collectes et études pour mettre au point des protocoles de création collective que nous activons à la suite avec les habitants volontaires. De là naissent des objets singuliers qui sont implémentés dans le dispositif d’exposition de Travelling Natures.

Au cours de ce temps de résidence nous réalisons aussi la cartographie sonore de chaque territoire en s’appuyant sur des données graphiques existantes mais aussi à partir de données concrètes que nous prélevons dans les espaces publics et privés des communautés humaines qu’elles soient urbaines ou rurales. Pour exemple, dans l’espace public nous captons les sons produits par les structures architecturales, les réseaux de circulations, les lieux de rassemblements etc.

A chaque mouvement de l’exposition, les cartographies sonores sont additionnées les unes aux autres. Elles constituent la base d’une application interactive pratiquée par le public.
Dans l’exposition, la cartographie sonore détermine un espace de données sensible et ouvert. Il sera traversé comme un territoire par les spectacteurs* qui, au gré de leurs déambulations, dessineront et joueront des trajectoires sonores singulières. Ces trajectoires sonores seront retransmises en direct dans des casques audio portés par chaque spectacteur et mémorisées par la machine informatique. Elles apparaitront comme des partitions sonores variables et formeront les palimpsestes d’une cartographie mouvante.

* spectacteurs : Le mot spectacteur est un mot-valise contractant le mot spectateur et le mot acteur. Le spectacteur est un spectateur-acteur de l’œuvre interactive… (Réjean Dumouchel : Le spectacteur et le contactile- In La Revue Cinémas)

Labège : "Maison Salvan" Toulouse Sud / Résidence et exposition (août 2011 à octobre 2012).

Saint-Denis : M.S.H. et C.I.C.M. Paris Nord / Résidence de recherche, journée d'étude.

Saint-Denis : Synesthésie / Résidence, exposition.

Région paloise : "Le Bel Ordinaire" Billère / Résidence et exposition (2012 à 2014).

Pau : École supérieur d’art de. Pau-Pyrénées / Mise en place d’un programme d’échanges internationaux pour des étudiants français et indonésiens.

Le projet reçoit le soutien financier du Conseil Régional d’Aquitaine dans le cadre de son programme d’aide à la mobilité des artistes.

H.O.N.F., Home of Natural Fiber, à Yogjakarta.

Yogyakarta Art Media Festival.

Institut Français de Yogyakarta ( IFI LIP )

L’Université des arts de Yogyakarta (ISI)

La cartographie sonore du projet Travelling Natures est une carte mouvante, conçue sur le principe du rhizome que Gilles Deleuze expose dans "Mille Plateaux". C’est un territoire qui prend la forme d’une grille sonore où chaque point est relié à chaque autre point, et permet un déplacement infini du spectacteur dans des espaces de données. La grille sonore est « acentrée », le lieu d'exposition, siège d’accueil du dispositif est virtuellement
mobile. La carte est traversée par des lignes de fuite dont les trajectoires sonores sont les individus marcheurs. La modélisation de la grille sonore en cartographie n’est pas un calque mais une autre carte. Chaque interaction avec un spectacteur redéfinit une nouvelle carte.

Au niveau de la conceptualisation et de la réalisation du projet ainsi que lors de son approche scientifique, un ensemble de coopérations ponctueront les temps de résidence sous la forme de conférences et d’interventions performatives. Ces contributions donneront lieux également à la capitalisation de ressources éditoriales en vu du projet d'édition Travelling Natures.

L’idée est donc d’organiser une série de temps forts qui ponctueront le projet Travelling Natures sur le lieu des résidences.

Benoît Courribet, musicien, ingénieur et théoricien, doctorant à la faculté de St Denis : Conférence sur la question de « la modélisation du son ».

Lyn Nékorimaté, artiste, plasticienne sonore et musicienne : Production d’un concert ou/et d’une diffusion sonore de sa dernière création.

Jean-Paul Labro, artiste, plasticien, vidéaste, performeur : Conférence sur son travail et/ou performance, participera à la journée d'étude sur "Art et Territoire" organisée par la M.S.H. en décembre 2011 à St Denis.

Plusieurs associations artistiques et scientifiques sont envisagées (liste non exhaustive) :

Evelyne Toussaint, théoricienne des arts, enseignante chercheur à l’UPPA (Pau) : Conférence sur les thèmes du laboratoire qu’elle co-dirige : ITEM (Identité Territoires, Expressions, Mobilités).

Thierry Guibert, artiste et théoricien, doctorant à l’UCAM de Montréal : Conférence sur le thème de « Effets de présence, les formes d’interactivité relevées dans l’art numérique ».

Hélène Douence, Géographe, enseignante chercheur à l’UPPA (Pau) : Conférence sur un des thèmes de sa recherche : « Le paysage est entendu comme un objet de médiation entre l’expérience individuelle d’être au monde et une construction collective qui fait société ».

Les membres du collectif d’artistes HONF : House of Natural Fiber, new media art laboratory basé à Yogyakarta, Indonésie / invité à travailler dans le cadre d’un workshop et d’une exposition.
www.natural-fiber.com/

Ferial Affif, Directrice de IVAA/Indonesian Visual Art Archive à Jogjakarta, invité dans le cadre d’une journée d’étude.
http://www.ivaa-online.org

Travelling Natures est un espace de condensation « fictionnel ».

À l’échelle d’une structure urbaine, la communauté se constitue au travers d'une mémoire et d'un patrimoine commun, ainsi que par une prise en charge symbolique et rationnelle du territoire.
Nous nous intéressons au dispositif de représentation des communautés quand il échappe aux Institutions qui légitiment le capital patrimonial. C’est à la singularité des habitants que nous nous adressons pour faire émerger la dimension subjective d’une communauté. D’après Hélène Douence* « elle se fonde sur une somme d’«auto-représentations» singulières qui convergent par les circuits de la communauté si ces flux sont activés dans l’espace mental et intime de chaque individu qui compose la communauté… ».

Un des enjeux de Travelling Natures est de faire émerger les dimensions imaginaires et fantasmées d’une communauté. Quand elle se dessine au présent, c’est dans une trame d’échanges intersubjectifs qui reste poreuse aux incidences d’une réalité contingente, sociale, et politique… C’est aussi ce rapport à son extériorité que nous voulons explorer.
Si notre travail consiste à faire converger ces flux d’auto-représentations dans une œuvre dont les données premières sont cartographiques, c’est qu’il y a dans ce principe de représentation du territoire une lecture possible de la communauté en tant qu’œuvre sociale et artistique. Nous pouvons faire référence ici aux monuments vivants de Jochen Gerz en tant que sculpture sociale.

Il s’agira pour nous de construire avec les communautés françaises et indonésiennes une entité collective hybride, basée sur l’expérience d’un inconscient collectif suscité par un rapport vivant et performatif au réel.

TRAVELLING NATURES est un projet d’art numérique lié aux représentations du territoire et des communautés qui y vivent. Basé sur un principe de cartographie sonore, le projet prendra la forme d’un dispositif multimédia, à la fois nomade et ouvert. Il intégrera une somme de données sonores et vidéographiques collectées au cours des différentes migrations du projet.

TRAVELLING NATURES inclut une démarche prospective auprès des populations issues de contextes territoriaux et culturels différents. Grâce à plusieurs partenariats déjà acquis, le projet se construira autour de cycles de résidences et d’expositions en France, à Labège, Saint-Denis, dans l’agglomération paloise, en Indonésie, sur l' île de Java.

TRAVELLING NATURES est porté par une équipe pluridisciplinaire composée de Jean-Paul Labro, artiste, vidéaste, Lyn Nékorimaté artiste et plasticienne sonore, Benoît Courribet, musicien et chercheur au Centre de recherche en Informatique et de Création musicale à l'Université de Paris VIII (C.I.C.M.). Ponctuellement, nous ferons appel à d’autres collaborations artistiques et scientifiques notamment dans le domaine des sciences humaines…

Diverses pratiques artistiques et rituelles issues de Java et Bali seront étudiées et réappropriées dans nos propositions comme l’utilisation de masques Balinais, le théâtre d’ombres (le wayang kulit), l’interprétation musicale du Gamelan et la voix du Dalang…
Nous nous intéressons particulièrement à la force interprétative et poétique du réel de la culture Balinaise. C’est au travers de leurs rituels que ces cultures, issues d’une spiritualité animiste, donnent au monde invisible une place centrale et diffuse qui rythme le quotidien. C’est cette porosité qui a stimulé notre attention. En effet, esprits et fantômes ne sont pas des habitants secondaires mais cohabitent avec les vivants qui doivent sans arrêt négocier avec eux pour canaliser les forces naturelles du réel. La question d’un monde invisible, parfois redouté et honoré est à raccorder avec la place que se donnent les peuples Balinais et Javanais dans le monde
visible. Les hommes sont reliés aux éléments et aux cycles de la nature, ils ne sont pas extérieurs au monde, mais le traversent en tant que flux vital, impermanent et éphémère. Pour apaiser les forces de la nature, il faut participer à l’énergie de ses cycles en construisant avec la présence des démons et des fantômes une réalité qui se partage, dans les structures de l’habitat, dans la vie sociale, et dans les formes artistiques comme le théâtre, la musique…

Quel réel partage la communauté labégeoise ? Quels démons et fantômes habitent Saint-Denis ?... Comment les représenter ? Quel temple leur édifier pour leur rendre hommage et les apaiser ? Autant de questions qui interrogeront nos problématiques contemporaines sur la pensée de notre espace social et politique comme de ses représentations…

Pour élaborer notre dispositif de représentation des territoires et des communautés, nous prévoyons de travailler à partir d’une étude des rituels collectifs issus des cultures vernaculaires françaises et indonésiennes. L’étude de ces rituels donnera lieu à une réappropriation artistique sous la forme de protocoles créatifs proposés aux habitants. Ces protocoles donneront lieux à des actions performatives et des scénarios filmés et enregistrés qui pourront mettre à jour des mythologies et des fictions locales... Cette collaboration menée avec les habitants produira des formes plastiques, sonores et visuelles hybrides qui constitueront un des matériaux du projet Travelling Natures.

Ce dispositif de représentation est élaboré à partir d’un principe d’échange des imaginaires entre l’Indonésie et la France. Il sollicite l’inconscient collectif d’une communauté à partir d’un processus de déterritorialisation de son propre héritage culturel. Les rituels Balinais et Javanais initieront des créations en France et vice versa.

• La corporéité du spectacteur dans un rapport immersif à l’image, celle de la cartographie élevée en relief et en courbes de niveaux.

• Le spectre architectural du lieu et le corps des spectacteurs dans le dispositif.

En procédant de la sorte, nous souhaitons créer un ensemble de synesthésies inédites entre la représentation sonore et la représentation visuelle. Le passage de l’une à l’autre dimension nous permettra de travailler sur la présence fantôme du corps et son éventuelle rémanence dans la mémoire collective (ici une mémoire plastique et sonore). En effet les spectacteurs en même temps qu’ils agiront comme les compositeurs de leurs propres cartographies sonores, seront modélisés et représentés en temps réel sur des écrans en tant qu’entités spectrales. Ils seront mémorisés par la machine informatique et formeront une communauté perceptible dans la temporalité de l’exposition, réapparaissant comme sujets de la mémoire vivante du lieu.

La cartographie sonore de Labège est dessinée selon sa propre géographie mais aussi selon sa dimension subjective qui est liée à l'imaginaire des habitants.

Si la Maison Salvan est située en un endroit fixe de la carte de Labège, le dispositif du projet, permet lui, la mobilité virtuelle de la Maison Salvan. Le dessin du bloc architectural de la Maison Salvan opère comme un curseur, une tête de lecture (sonore) qui se déplace sur la carte de Labège. Chaque nouveau positionnement du « Bloc Maison Salvan » sur la carte détermine les contours d’un fragment de la cartographie sonore. Les mouvements du « Bloc Maison Salvan » peuvent être commandés par le spectacteur qui peut échapper au bloc architectural de la Maison Salvan et se déplacer d’un point à un autre à l’extérieur du lieu de l’exposition.

La cartographie sonore fera l’objet d’une modélisation visuelle*(1) retransmise en directe dans l’espace d’exposition sous forme de projections vidéos.

Dans l’exposition du projet "Travelling Natures" plusieurs types d’objets autonomes textuels, graphiques, vidéographiques, photographiques et sonores seront rassemblés de manière connexe au dispositif de la cartographie interactive.

Les technologies numériques ont pour caractéristique de fournir une représentation de tous types de contenus (nombres, caractères, textes, images, sons, vidéos…) sous la forme de séries de nombres (le système midi, système ouvert par excellence, appuyé de l'interface Max MSP constitueront une partie des outils utilisés).
Ainsi, il est possible d'opérer à des changements de nature de ces données et, par exemple, d'interpréter n'importe quel contenu numérique comme un signal sonore. On peut donner à entendre un relevé topographique, l'image d'un paysage… On parle alors de "sonification". On peut également "cacher" des données en les insérant dans un flux numérique de différente nature, ce procédé est appelé "stéganographie" et permettra de "cacher" l'enregistrement d'une conversation dans le relief d'un paysage de synthèse…

L'ensemble du corpus sonore recueilli et/ou généré par les techniques décrites précédemment pourra alors être agencé en temps réel selon des règles prenant en compte les déplacements des visiteurs de l'installation sur site à la Maison Salvan. Des techniques de capture de mouvement permettront une navigation simultanée dans un espace virtuel dans lequel le visiteur cohabitera et interagira avec des entités sonores en fonction de ses déplacements (comportements de fuite ou d'attraction… ).